Résumé
Cet article démontre que depuis les années 1970 une dualité divise le concept d'art islamique. D'une part, nous avons l'art islamique en tant que sujet d'un mode moderne d'enquête historique, inventé et développé pendant la période coloniale en Europe mais ensuite repris par des universitaires du monde entier, y compris des universitaires musulmans. C'est l'art islamique de l'histoire de l'Art Islamique en tant que domaine d'érudition laïque. Mais ensuite, dans la période de décolonisation, et plus particulièrement depuis les années 1970, on assiste à la naissance d'une autre conception de l'Art Islamique qui n'est pas tournée vers le passé. Cette seconde notion d'Art Islamique cherche à envisager l'art islamique comme une composante d'un projet tourné vers l'avenir, d’une tentative de réorganisation de la vie sous et contre la modernité. Elle situe l'art islamique non pas principalement dans des objets historiques, mais surtout au centre d'une « vision civilisationnelle » contemporaine de l'islam. Ce dernier Art Islamique est un projet explicitement moderne avec un programme soi-disant de réforme sociale. Cet article explore les défis que cette dualité dans l'Art Islamique pose à la discipline de l'Histoire de l'Art, en particulier en termes de relation entre les deux champs académiques de l'Art Islamique et du modernisme mondial.