Résumé
À la fin du XXe siècle, au Soudan, une nouvelle école d’art visuel est apparue. Elle cherchait à combler ce qu’elle considérait comme un gouffre entre le renouveau islamique contemporain et les arts. Déplorant que ces derniers soient allés dans le sens de la vie laïque, tandis que le premier avait pris un penchant profondément anti-esthétique, l’école s’est tournée vers les archives esthétiques du soufisme pour revitaliser la pratique artistique islamique pour le XXIe siècle. Se faisant appeler «L’École de l’Un» (Madrasat al-Wāhid), cette école et ses adeptes ont cherché à exploiter le pouvoir de la beauté inhérent aux traditions théologiques et rituelles islamiques tout en le conditionnant à de nouvelles fins, celles qui étaient en relation compliquée avec les projets étatiques de l’islam. Prenant comme point de départ un mystère que l’auteur est venu démêler autour d’une peinture particulière du fondateur de l’École de l’Un, Ahmad ‘Abd al-’Āl, cet essai propose une approche microhistorique du problème de l’esthétique soudanaise de la fin du XXe et du début du XXIe siècle. Dans ce qui suit, l’auteur voyage avec Ahmad ‘Abd al-’Āl à la fois dans le passé récent et lointain, alors que l’artiste cherche à évoquer une expérience esthétique qui servira à la fois Dieu et contribuera à un projet de réforme pieuse qui a depuis disparu.