Résumé
Le polymathe ottoman Yanyalı Esad Efendi, alias Asʿad al-Yānyawī, l’un des principaux savants de l’époque d’Ahmed III et de son grand vizir İbrahim Paşa (XIIe/XVIIIe s.), est fameux pour avoir traduit en arabe, sous forme paraphrastique, des commentaires à la Logique et à la Physique d’Aristote par Ioannes Cottunius (m. 1658), de l’école de Padoue. Sa Traduction du Commentaire très lumineux sur la logique participe, à cet égard, d’un projet de retour à la pensée aristotélicienne pour lequel il reçut l’appui des plus hautes instances de l’Empire. Mais qu’est-ce qui se trouvait exactement derrière cette entreprise de revivification d’une tradition philosophique, délaissée depuis longtemps en Islam au profit de la tradition avicennienne et des courants nés dans son sillage ? Pour répondre à une telle question, un élément clé est le prologue de cette traduction dans lequel al-Yānyawī nous donne des indications précieuses sur les motivations de son entreprise de refondation et sur le mode opératoire qu’il adopta. Parmi les points centraux de son exposé se trouve notamment une critique de la philosophie islamique qui semble être tirée à la fois d’al-Ġazālī et d’Averroès. Cet article propose une édition critique accompagnée d’une traduction commentée de la première partie du prologue, où est exposé le projet d’al-Yānyawī.